Quelque part sous les combles, au dernier étage du 12-14 de la rue Jean Sans Peur, trois agents sont plongées dans une conversation des plus sérieuses. Des volutes de fumée s’échappent de trois tasses pleines de café brûlant. L’odeur est saisissante, elle couvre celle du papier sec. Une lumière grisâtre perce à travers les épais nuages de ce morne jour d’été.
Au premier abord, les agents semblent échanger des informations concernant une pile de dossiers qu’ils dissèquent minutieusement devant eux, mais le témoin novice n’y entend goutte. Les propos sont cryptés par une sorte de code que seules ces agents surentraînées connaissent, et comprennent.
« -Vous avez quoi ?
-Bersee, donc CCTP, mais là, loi intercom, rien à voir, et détachement
-vous êtes sure ? S’enquiert la deuxième.
-Non non, moi je penche plutôt pour une loi Sapin, interjette une troisième.
-Loi Sapin ! Il perd son CDI alors, reprend la première.
-Pas forcément, s’il y a une vacance ?
-Même, indice 1081, en mise à dispo !
-indice 1081 ! s’exclame la deuxième, alors on y va.
-avec quoi ? Loi sapin ? Non lieu.
-alors on y va au bluff.
-au bluff !
-parfois, il faut. »
La troisième ne s’en remet pas, mais devant le visage emprunt de triste détermination de la seconde, elle cède.
« -bon ensuite alors
-là, saisonnier occasionnel
-non soumis !
-je sais, je leur fait une lettre.
-bon ensuite !
-maison folie.
-encore ! ah non, on reste couché.
-mais c’est un recrutement sans vacance
-alinéa 1, couché j’ai dit ! »
Bien malgré elle, la première s’incline. Et la discussion reprend.
Et la pile de dossier se dissout au fil de cet étrange conciliabule, dans cette langue si particulière alliant jargon technique, imbroglio juridique et acronymes divers et variés.
Etait-ce une partie de poker ?
Etait-ce un round de Kamoulox ?
Etait-ce… une réunion de travail ?
Notre observateur, perplexe, n’en saura jamais rien. A vous de juger.
C.
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